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Agriculture du futur, le meilleur de la tech et de la nature
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D’ici à 2050, le secteur agricole devra nourrir deux milliards d’êtres humains supplémentaires, tout en s’adaptant à des réalités telles que les pénuries d’eau ou le développement de maladies. À quoi ressemblera notre agriculture du futur ? Pour le savoir, nous avons interrogé Guillaume Morel-Chevillet, responsable végétal urbain de l’Institut technique des professionnels du végétal Astredhor. Entre innovations high-tech et résilience, il dépeint pour nous les tendances d’un milieu en pleine mutation.
Les satellites et les drones offrent déjà aux agriculteurs de précieuses données pour prendre des décisions. Cette tendance devrait s’accentuer dans l’avenir pour répondre aux enjeux d’environnement et de productivité. “Je participe à plusieurs jurys de l’innovation en France, raconte Guillaume Morel-Chevillet. Je vois émerger de plus en plus de startups autour de l’utilisation des drones pour l’agriculture. En arboriculture et en maraîchage, en culture hors-sol ou en plein air, ces outils offrent la capacité de mieux gérer les cultures, d’anticiper les maladies, le stress hydrique. On peut ainsi mieux soigner les plantes et cibler l’arrosage.”
L’agriculture du futur sera bel et bien connectée. L’Internet des Objets (Iot) est en plein essor dans le secteur pour collecter, stocker et interpréter des données. Robots agricoles et capteurs pour les plantes permettent de contrôler son exploitation à distance et d’optimiser ses rendements. “On voit apparaître de plus en plus d’innovations de ce type, explique Guillaume Morel-Chevillet. Des bracelets connectés et même des casques de réalité virtuelle font leur apparition pour aider les exploitants à repérer les maladies ou les besoins en eau. Ils agissent comme de véritables assistants de production !"
Combinés aux IA, ces outils permettent de réaliser un arrosage de précision, connaître le meilleur moment pour lancer la récolte ou limiter l’usage des traitements. Néanmoins, cette digitalisation de l’agriculture a un coût. “En Amérique du Sud ou en Afrique, ces innovations nécessiteront un certain temps pour être pleinement intégrées dans les process agricoles.”
Mais le futur de l’agriculture ne s’arrête pas aux innovations high-tech. Pour développer une production efficace tout en s’adaptant au réchauffement climatique, l’agriculture doit d’ores et déjà revisiter des techniques parmi les plus ancestrales. “On redécouvre aujourd’hui les associations de plantes, à l’image de l’agroforesterie. Ce mode d’exploitation mêle plantations d’arbres et maraîchage ou production de céréales. Une façon d’optimiser les parcelles avec un maximum de plantes et de rendement, tout en limitant les traitements.”
La réduction de l’usage des pesticides oblige en effet les producteurs à développer des solutions basées sur la nature. “La Protection Biologique Intégrée (PBI) permet d’accueillir des auxiliaires de culture, ces petites bêtes qui viennent protéger l’exploitation. On utilise également des plantes de service, à l’image des rosiers postés en bout de rang dans les vignes pour contrer les attaques de champignons. En appliquant sur les plantes des huiles essentielles ou des bactéries, la bio stimulation dynamise les racines pour que les plantes résistent aux maladies.”
Les pénuries d’eau sont une réalité déjà tangible dans nombre de régions françaises. Outre les technologies de pointe, le végétal peut aussi apporter des solutions. “Les producteurs doivent adapter leurs gammes de plantes, avec des variétés qui nécessitent moins d’arrosage. On redécouvre par exemple la culture de pois chiche dans le sud de la France, jusque-là produite au Maghreb. L’amendement organique et le paillage permettent de retenir l’eau. Pour garder des rendements corrects, les agriculteurs mènent à bien des stratégies de collecte et de stockage de l’eau de pluie.”
De nouvelles variétés, plus résistantes, voient le jour pour contrer les effets du dérèglement climatique. “Les industriels et les semenciers travaillent déjà sur des croisements de variétés avec des besoins en eau moins importants. Il ne s’agit pas d’OGM, mais de croisements génétiques naturels, avec des plantes issues de milieux plus arides. Certaines villes, comme Lyon, ont déjà fait le choix de planter des arbres méditerranéens dans l’espace public. On devrait également assister à des évolutions dans notre alimentation, en lien avec ces changements.”
D'ici à 2050, les zones urbaines abriteront près de 70 % de la population mondiale. Cela signifie-t-il que l’agriculture va prendre plus de place dans nos villes ? “Selon moi, nous allons retrouver, dans les prochaines années, une proximité entre ville et campagne, avec le redéveloppement des ceintures vertes. C’est complexe de trouver un modèle économique viable pour l’agriculture intra-urbaine, et nous avons, en France, des terres fertiles à proximité des centres urbains. Nous allons retrouver une synergie agricole en ville via le circuit court. L’agriculture périurbaine sera revisitée avec des moyens logistiques adaptés et des protections foncières permettant d’éviter l’étalement urbain.”
L’agriculture urbaine, dominée par la culture indoor, ne sera pas le modèle dominant en 2050. “Je ne crois pas à l’ultra-farming intensif, exprime Guillaume Morel-Chevillet. La France est un pays agricole. Le prix de l’énergie a augmenté, et la technologie coûte cher en termes de biomasse produite au km². Ce modèle est plus adaptée à des plantes très particulières, comme les micro-pousses, ou à des milieux désertiques, glaciaires ou insulaires. Je m’interroge aussi sur l’acceptabilité d’une agriculture urbaine intensive pour les consommateurs français : sont-ils prêts pour le tout indoor ?”
Si l’agriculture indoor ne se prête pas à la production en gros volumes dans notre pays, elle revêt d’autres atouts. De nombreuses initiatives, à l’image des potagers d’intérieurs, apportent une solution aux citadins et ramènent le plaisir du jardinage en ville. Dans la majorité des cas, ces projets font avancer la recherche agricole. “Les cultures en intérieur se développent notamment chez les semenciers, qui contrôlent le cycle végétal et collectent des pollens. Les domaines de la pharmacie et de la cosmétique développent également ce type de culture pour s’approvisionner en molécules. L’indoor a de l’avenir dans la recherche et le développement ! Par exemple, les éclairages LED issus de techniques indoor sont aujourd’hui utilisés dans des serres, en complément de la lumière naturelle. Les capitaux levés et les techniques expérimentées permettent de proposer à l’agriculture classique des innovations autour de l’automatisation ou de l’agriculture de précision.”
Guillaume Morel Chevillet suit de très près l'aventure Urban Cuisine. “Je trouve le concept intéressant du point de vue de l’éducation. Les potagers d’intérieur ramènent la nature en ville, et répondent aux besoins de végétaux frais pour les professionnels et les particuliers. C’est ça aussi, l’avenir de l’agriculture en ville !”