Et si on pouvait prolonger la durée de vie de notre électroménager ?

Machine à laver, four micro-ondes, cafetière, aspirateur ou sèche-cheveux… Nos appareils électroménagers ont une durée de vie de plus en plus limitée. En cause : l’obsolescence, qu’elle soit technique ou psychologique. Quelles sont les solutions contre le vieillissement prématuré de nos équipements ? Comment agir en tant que consommateur ? Nesrine Dani, Directrice Partenariats & Innovation et Envie Le Labo au sein du réseau Envie, nous éclaire.

Électroménager, une durée de vie de plus en plus réduite

Le fléau de l’obsolescence programmée

Depuis des décennies, notre modèle de société repose sur la consommation. Pour les grandes marques, produire plus équivaut à plus de chiffre d'affaires. C’est en partie pour cette raison que nombre d’appareils électroménagers subissent l’obsolescence programmée.

L’association HOP (Halte à l’Obsolescence Programmée), distingue plusieurs types d’obsolescence : 

• L’obsolescence technique, la plus connue. Elle se définit par des composants inamovibles ou à durée de vie limitée. 
• L’obsolescence indirecte. Dans ce cas, les pièces de rechange sont inaccessibles ou retirées du marché.
• L’obsolescence esthétique ou psychologique. Elle naît avec la mise sur le marché de produits plus performants, rendant le modèle précédent obsolète. 
• L’obsolescence logicielle, présente dans certains appareils électroménagers connectés.

Le réseau Envie, qui commercialise des appareils reconditionnés, fait chaque jour face à l’obsolescence technique. “Beaucoup de fabricants font la course au low-cost. Les pièces sont de moins en moins solides. Pour le petit comme pour le gros électroménager, on constate des pannes récurrentes, liées à des pièces spécifiques comme les condensateurs” indique Nesrine Dani.

Des conséquences sur l’homme et l’environnement

En plus d’être frustrante pour le consommateur, l’obsolescence engendre de lourdes répercussions sur notre société. Avec des coûts de production toujours plus bas, les équipements électroménagers sont produits dans des pays en voie de développement, où les ouvriers subissent des conditions de travail très difficiles.

Défrichage des sols, élimination de la végétation, destruction de terres fertiles… Cette course à la production implique de se fournir en matières premières et en métaux rares. À l’autre bout de la chaîne, ce sont des milliers de tonnes de déchets supplémentaires qui finissent enfouis, incinérés ou envoyés dans les pays du Sud, responsables d’une pollution dramatique pour la biodiversité et la santé humaine. 

Quelles réponses face à l’obsolescence ?

Prendre en compte la durée de vie de l’électroménager 

Pour contrer les effets négatifs de l’obsolescence, les fabricants peuvent se tourner vers l’éco-conception. Cette méthode de design implique de penser la durée de vie d’un produit dans son intégralité. Les objets ont un coût plus élevé pour le fabricant et pour le consommateur, mais sont de meilleure qualité, plus faciles à réparer et à entretenir, et s’adaptent aux évolutions technologiques. 

“Changer de paradigme implique de modifier l’équilibre économique et de transitionner vers un modèle circulaire” précise Nesrine Dani. Grâce à cette nouvelle économie, il sera possible d'envisager de nouveaux types d’emplois locaux et non délocalisables dans la réparation, les services, le développement durable ou encore l’agriculture de proximité. 

Le rôle des pouvoirs publics

Les institutions ont un rôle crucial à jouer pour évoluer vers une économie circulaire. En France, la loi de transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 sanctionne l’obsolescence programmée. La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, votée en février 2020, prévoit la mise en place progressive d'un indice de durabilité des produits. 

Le fonds réparation, issu de la loi AGEC, permet aux citoyens de réduire leur facture et de démocratiser la réparation. À l’échelle de l’Europe, le nouveau règlement sur l’écoconception pour des produits durables, publié le 30 mars 2022, se positionne en faveur de produits plus circulaires et plus durables sur le plan environnemental.

Nesrine Dani s’interroge : “Même si la France se veut précurseure en la matière, toutes ces avancées sont timides. Les citoyens sont-ils suffisamment armés pour choisir leurs appareils via un indice de durabilité ? Ne pourrait-on pas imaginer un contrôle technique sur les équipements électroménagers, au même titre que pour les automobiles ?”

Agir en tant que consommateur

Entretenir pour prolonger la durée de vie de son électroménager

Selon une étude de l’ADEME, 50 % à 70 % des pannes pendant la période de garantie de nos équipements sont dues à un manque d’entretien ou à un défaut d’utilisation. C’est dire l’importance de prendre soin de nos appareils électroniques ! 

Le réseau Envie conseille en premier lieu de lire la notice d’utilisation de son appareil. Seuls 46 % des Français prennent la peine de le faire intégralement ! “Nous préconisons également de se créer des alertes pour l’entretien : nettoyage, changement de filtre, vidange… Vous pouvez aussi participer à des ateliers pratiques que nous animons gratuitement au sein de notre éco-lieu Envie Le Labo et vous documenter grâce à nos fiches pratiques ou celles de l’ADEME” insiste Nesrine Dani.

Réparer et acheter reconditionné

La réparation est l’une des clés pour allonger la durée de vie de son électroménager. Mais est-il encore possible de réparer, à l’heure de l’obsolescence ? “C’est très rare de ne pas pouvoir agir sur un équipement. La difficulté majeure, c’est de trouver du personnel formé, notamment pour intervenir sur des cartes électroniques. En France, il existe très peu de formations de techniciens réparateurs. Plusieurs écoles ont ouvert leurs portes ces dernières années, sous l’impulsion des fabricants eux-mêmes. Envie développe également sa propre École Envie du réemploi et de la réparation. Il reste néanmoins difficile de répondre à la demande.”

Nombreux sont les appareils électroménagers essentiels à notre quotidien. L’exemple le plus frappant : la machine à laver. “Les consommateurs préfèrent se débarrasser de leur machine et passer sur du neuf plutôt que de patienter durant la réparation. C’est pour cette raison que nous proposons du prêt de matériel le temps de la réparation” précise Nesrine Dani.